-
Petit bréviaire de polémique politique
Chers candidats potentiels
La situation politique intérieure devient de plus en plus tendue avec cette histoire de retraite à 64 ans et vous vous dites qu'en cas de dissolution de l'assemblée, vous aimeriez bien tenter votre chance. Mais vous vous laissez envahir par le doute : Oui, mais si vous tombiez sur plus expérimenté que vous ?
J'ai donc décidé de vous aider et d'aider les candidats de tous bords qui se lanceront pour la première fois en politique à éviter le pire qui puisse leur arriver : le trou noir, l'absence de répartie, le bégaiement devant l'adversaire et finalement la honte et la défaite !Voici donc quatre arguments forts pour vous sortir la tête haute de toutes les situations difficiles.
1) le principe de précaution
C'est l'argument que vous devez avoir sans cesse à l'esprit car c'est celui qui vous sortira des situations les plus difficiles, notamment quand vous avez du mal à argumenter face à un adversaire qui connait bien son dossier et qui vient de faire un démonstration brillante.Sachez qu'on peut TOUT contester avec le principe de précaution, le nucléaire et les éoliennes, la nécessité de se faire vacciner et les dangers de la vaccination, la nécessité de réglementer et les abus de la réglementation, bref tout et le contraire de tout.
Avec un peu d'entrainement vous pourrez parfaitement démontrer que l'homme de Néanderthal, en utilisant le feu avant d'avoir créé un corps de sapeurs-pompiers mobile, a violé de façon scandaleuse ce principe fondamental. Vous pourrez aussi fustiger nos aïeux qui ont continué inlassablement à faire des enfants avant même le développement de la médecine obstétrique tout en sachant qu'un certain nombre de femmes et d'enfants allaient mourir en couche.
2) C'est pour masquer les vrais problèmes
Ca, c'est pour éviter d'évoquer un sujet difficile à trancher, ou sur lequel vous n'avez aucune opinion, ou dont vous vous foutez complètement.
Pour être efficace, il convient de respecter scrupuleusement la procédure suivante :- Choisissez préalablement un ou deux thèmes que vous maitrisez parfaitement, disons par exemple le ramassage des ordures ménagères dans le 3ème canton de haute-Normandie ou la fermeture d'un bureau de poste dans le Vaucluse et prenez bien soin dès le départ de présenter ces deux sujets comme étant "les vraies préoccupations des vrais gens".
- Précisez ensuite, à la première occasion, que vous n'êtes pas disposé à vous laisser entrainer dans les polémiques stériles qui n'ont pour objet que de masquer les vrais problèmes des Français.
Le tour est joué. Lorsque votre adversaire tentera d'évoquer un sujet que vous maitrisez mal, il ne vous restera plus qu'à lui rappeler que tout cela c'est pour détourner les gens des vrais problèmes et que vous refusez de vous prêter à ce petit jeu de politiciens parisiens coupés de la France profonde. Il ne vous restera plus alors qu'à enchainer sur la gestion calamiteuse des ordures ménagères par les élus de votre canton.
3) Mettre l'humain au coeur de la politique
Là encore, il s'agit de vous sortir d'un mauvais pas. Votre adversaire vient de développer des thèmes très techniques (déficit du commerce extérieur, taux directeur de la Banque Centrale Européenne, surévaluation du yuan) et vous êtes désemparés car ce sont justement les sujets sur lesquels vous aviez décidé de faire l'impasse compte tenu de leur aspect un peu ardu.Rassurez vous, rien n'est perdu ! Prenez l'air inspiré de celui qui a décidé de prendre de la hauteur et expliquez lui tranquillement que, pour ce qui vous concerne, vous avez décidé une bonne fois pour toute de mettre l'humain au cœur de votre analyse politique et que rien ("je dis bien, RIEN !" ) ne vous fera changer d'avis, et que vous n'êtes disposé à discuter du taux directeur de la BCE alors qu'une ménagère que vous avez croisé en venant sur ce plateau vous a appris que le prix du Yaourt brassé nature avait augmenté de plus de 8%.
4) les patrons du CAC 40
Les patrons du CAC40 présentent deux qualités qui font d'eux une cible idéale pour illustrer votre refus viscéral des inégalités : d'une part, ils ne sont pas nombreux, donc vous ne vous ferez pas beaucoup d'ennemis en les attaquant, et d'autre part, il ne viendrait à l'idée de personne de prendre leur défense . Vous n'aurez donc pas à craindre d'être contredit par un journaliste teigneux ou par vos contradicteurs.Le risque serait même que votre adversaire soit d'accord avec vous, ce qu'il convient d'éviter à tout prix, si vous voulez vous démarquer. Il faut donc prendre soin d'intervenir le premier et de vous exprimer comme si vous étiez le seul en France (et même en Europe !) à condamner les salaires excessifs de ces rapaces de la finance. N'hésitez donc à pas à suggérer à demi-mot que votre adversaire, lui, y est favorable : " je vais vous dire, monsieur, et j'assume avec courage mes opinions : certains patrons du CAC40 ont des salaires excessifs ! et je suis prêt à en débattre avec vous devant le peuple Français !"
Une seule contrainte : évitez soigneusement d'évoquer le salaire de certains footballeurs connus, cela pourrait vous valoir l'inimitié de leurs nombreux admirateurs. Si on tente de vous mettre en difficulté sur ce point, répondez simplement : "Mais ce n'est pas pareil, enfin, vous confondez tout !" .
Tags : politique, candidat, demagogie, vrais, sujet, electoral
-
Commentaires
Excellente stratégie. Il ne reste plus qu'à vous présenter...A moins que vous l'ayez déjà fait.
J'ai été tenté un jour lorsqu'un élu, avec qui j'avais des relations professionnelles, m'a proposé de me lancer dans l'arène en devenant son adjoint aux prochaines élections cantonales. Et pour commencer, il me remit une liste des mariages, baptêmes, enterrements du week-end où je devais me rendre pour le représenter et me faire connaitre.
J'ai compris ce jour-là que la politique était un métier. Et que ce ne serait jamais le mien.