• Rimbaud s'ennuie !

    Arthur Rimbaud est rentré à Charleville chez sa mère. Il a 17 ans. Il écrit à un de ses professeurs : 

    "Je suis rentré à Charleville un jour après vous avoir quitté. Ma Mère m'a reçu, et je suis là, tout à fait oisif. Ma mère ne me mettrait en pension qu'en janvier 71. (...) 

    Je meurs, je me décompose dans la platitude, dans la mauvaiseté, dans la grisaille. Que voulez-vous, je m'entête affreusement à adorer la liberté libre, et... un tas de choses que "ça fait pitié", n'est-ce pas ? (...) 

    Elle a voulu m'imposer le travail perpétuel, à Charleville (Ardennes) ! Une place pour tel jour, disait-elle, ou la porte. - Je refusai cette vie ; sans donner mes raisons : c'eût été pitoyable. Jusqu'aujourd'hui, j'ai pu tourner ces échéances. Elle en est venue à ceci : souhaiter sans cesse mon départ inconsidéré, ma fuite ! Indigent, inexpérimenté, je finirais par entrer aux établissements de correction. Et, dès ce moment, silence sur moi!" 

     

    En langage poétique, ça donne ça

     

    "L'ennui n'est plus mon amour. Les rages, les débauches, la folie, dont je sais tous les élans et les désastres, - tout mon fardeau est déposé. Apprécions sans vertige l'étendu de mon innocence. 

    Je ne serais plus capable de demander le réconfort d'une bastonnade. Je ne me crois pas embarqué pour une noce avec Jésus-Christ pour beau-père. 

    Je ne suis pas prisonnier de ma raison...

    Je veux la liberté dans le salut : comment la poursuivre ? Les goûts frivoles m'ont quitté. Plus besoin de dévouement ni d'amour divin. Je ne regrette pas le siècle des coeurs sensibles. Chacun a sa raison, mépris et charité : je retiens ma place au sommet de cette angélique échelle de bon sens. 

    Quant au bonheur établi, domestique ou non... non, je ne peux pas. Je suis trop dissipé, trop faible. La vie fleurit par le travail, vieille vérité : moi, ma vie n'est pas assez pesante, elle s'envole et flotte loin au-dessus de l'action, ce cher point du monde."

    (Extraits de Une saison en enfer) 

     

    Il a écrit cela à 19 ans. Il cessera d'écrire deux ans plus tard. Pour se mettre à bosser. 

     

     

     

    « Les prétendants douteux de MarianneOh my God ! j'attends la suite avec impatience ! »