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Poésie : le grand confinement
J'ai des circonstances atténuantes : le grand confinement me monte à la tête. Hugo (mon boss) me pardonnera, j'en suis sûr !
Lorsque sans gant, sans masque, échevelé, livide
Au milieu de la foule, la tête lourde et le corps las
Carlus se fut enfui de devant le Covid,
Comme le soir tombait, l’homme inquiet arriva
Devant un restaurant de grande réputation ;
Sa femme épuisée et ses fils fatigués
Lui dirent : « Entrons ici pour prendre une boisson
L’endroit parait festif et bien achalandé »
Regardant l'intérieur, comme à son habitude
Carlus leva les yeux en signe de lassitude
Et vit l’oeil du Covid, entre deux ornements,
En train de l'observer dans l’ombre fixement.
« Trop fréquenté », dit-il avec un tremblement.
Il bouscula ses fils hagards et sa femme lasse,
Et se remit à fuir, sinistre dans l’espace.
Il marcha sans arrêt, sans se soucier du temps.
Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
Furtif et sans trêve, sans regarder derrière lui,
Sans repos, sans sommeil ; il atteignit un pré
Avec un beau jardin protégés par des murs
« Arrêtons-nous, dit-il, cet endroit est très sûr.
Car le Covid ici n’a pas pu pénétrer. »
Mais comme il s’asseyait, dans son champ de vision
Il vit l’oeil du Covid au fond de l’horizon.
Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
« Cachons-nous ! » cria-t-il ; Rentrons à la maison
Je veux rester tout seul ! Fermez toutes les portes
Et aussi les fenêtres ! Seule ma santé m’importe !
Et veuillez calfeutrer la plus petite fissure
Comme dans un sépulcre, ce sera bien plus sûr,
Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
On l’enferma chez lui, et Carlus dit « C’est bien ! »
Puis il s’installa seul, devant son écran plat.
Mais sur toutes les chaînes, on ne parlait que d'ça.
Il détourna les yeux, mais Coronavirus
Etait sur tous les murs et regardait Carlus.