• Il y a réfugiés et réfugiés

     


    Et que dit le monde de tout cela ? Je veux dire le monde non européen. Les vrais gens, pas les diplomates au langage policé, pas les ennemis déclarés. Non, des gens que je connais, les comptes Facebook des Franco-Libanais et des Syriens que je consulte , des amis antillais, des discussions avec leurs amis que me racontent mes enfants…


    La première chose que raconte ce monde (et qui est reprise par des journalistes et des politiques français et européens), c’est, en résumé, que quand les réfugiés sont blancs et chrétiens, ils sont mieux traités que les autres. Je retiens mon agacement et j’ai envie de leur dire qu’avant d’être tout cela, les réfugiés ukrainiens sont d’abord nos proches voisins et qu’il est normal et même légalement obligatoire d’accueillir et d’héberger vos voisins de palier qui fuient un danger. En plus, ce sont majoritairement des femmes et des enfants. L'obligation d'accueil et de protection devient donc  absolue. Il n’en est pas de même pour quelqu’un qui vous dirait que pour fuir un danger dans son salon, il a pris un taxi, a traversé la ville sur plusieurs dizaines de kilomètres et choisit votre appartement pour se réfugier.

    Mais la proximité n’a pas l’air d’être un critère aujourd’hui. L'opinion générale est que l’Europe est tenue moralement d’accueillir tous les réfugiés de la planète, d'où qu'ils viennent. Un réfugié afghan a traversé une demi douzaine de pays pour arriver en Europe. Et personne pour se demander pourquoi il n'a pas demandé l'hospitalité à l'un de ces pays. La question serait d'autant plus légitime que l'on sait que plus de la moitié des habitants de cette planète aimeraient bien vivre l’occidental way of life faite de liberté et d’allocations.

    Et puis il y a quand même une différence fondamentale, une différence de nature entre des réfugiés qui viennent dans l’intention de rester définitivement et des réfugiés qui ne demandent qu’à rentrer chez eux dès que ce sera possible. On ne peut pas amalgamer les deux sous le terme "réfugiés" sans plus de précision, sinon on ne comprend rien aux problèmes des réfugiés dans le monde. On ne comprend ni le désaccord entre le Haut-Commissariat aux Réfugiés et les autorités libanaises à propos des réfugiés syriens, ni le problème du droit au retour des Palestiniens en Israël, ni le problème des migrants mexicains, ni les problèmes que posent à la Colombie et au Pérou les six millions de réfugiés vénézuéliens.

    Dans mon enfance antillaise, quand un ouragan menaçait l’île, les gens "bien logés" accueillaient chez eux pendant un ou deux jours une dizaine de voisins qui habitaient des zones dangereuses, près de la mer ou d'une rivière, par exemple. Des familles s'entassaient à quatre sur un lit, d'autres dormaient sur des matelas gonflables dans le salon. L'ambiance était presque festive. Pendant deux jours, le temps que l'ouragan s'éloigne. Il est évident que le nombre de personnes accueillies n’aurait pas été le même s’il s’agissait de les héberger pendant plusieurs mois ou plusieurs années. L'ambiance non plus n'aurait pas été la même.


    Et en même temps, parallèlement à ce reproche, il y a dans une partie du monde non occidental un sentiment diffus de satisfaction un peu... comment dire...?  revancharde à voir notre continent défié et humilié. Car pour ce monde, c'est l'Europe toute entière qui est attaquée et qui ne se défend pas parce qu'elle a la trouille que Poutine aille plus loin. La satisfaction de celui qui pense avec un sourire amusé "Pas possible ? le viking invincible se fait botter le cul ? Alors comme ça, les maîtres du monde ont peur des bombes, comme nous ?"   Un sentiment  de satisfaction qui s'accentue, dans le monde arabe en tout cas, quand on apprend que la cible de la fureur de Poutine est juive.  Ce sentiment se traduit souvent par une certaine sympathie voire de l'admiration pour Poutine.  Et celui qui se veut le chef d'une grande puissance est perçu alors  comme un représentant du Tiers-Monde défiant l’Occident ou, paradoxe suprême, comme un David antisémite terrassant le Goliath juif que nous sommes pour eux. 

     

     

     

    « Revue de presse du 03/03/2022Rien à foutre ? »

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