• Salauds de médecins !


    Pauvre Madame Fignon

    Son mari Laurent, le champion cycliste, est mort d’un cancer. On disait il n’y a pas si longtemps "d’une longue maladie", tellement le mot faisait peur. Et elle écrit un livre pour raconter sa douleur, sa tristesse et pour dire sa révolte contre… les médecins !

    Dans un livre intitulé "Laurent", écrit avec Michel Cimes, elle reproche aux médecins au moins trois choses graves :

    1) Que Laurent Fignon ait été informé de son cancer alors qu’il conduisait sur l’autoroute

    2) Qu’il ait fallu attendre plusieurs mois (neuf mois dit-elle) avant qu’on lui dise qu’il s’agissait d’un cancer des poumons, (lui qui ne fumait pas, ajoute-t-elle)

    3) Que sitôt après la mort de son mari, la chambre ait rapidement été nettoyée et le lit refait.

     

    Pauvre Madame Fignon

    Moi aussi j’ai été confronté au cancer d’un proche et je sais la douleur qu’on peut éprouver à cette occasion. Mais moi, je ne me suis pas trompé d’ennemi. L’ennemi était ce cancer qui commençait à ronger de l’intérieur un petit corps d’enfant. Et nos alliés étaient ces médecins qui ont tout fait pour terrasser la bête et l’exterminer.

    Ca s’est passé il y a plus de 30 ans et je n’ai pas le souvenir que ni les médecins, ni les infirmières aient été d’une grande brutalité avec nous. Ils nous ont pourtant bien dit "les analyses le confirment : votre enfant à un cancer des lymphomes". Mais ni sa mère, ni moi n’avons trouvé ça brutal de leur part. C’était une information. Ils n’avaient aucune raison de nous dire "peut-être" alors qu'il n'y avait plus de doute. Ils n’avaient aucune raison de nous dire "nous sommes désolés" alors qu’ils n’y étaient pour rien !

    Desproges aussi m’avait énervé à l’époque avec sa fameuse blague "Chimiothérapie, métastases, Professeur Schwartzenberg, espoir : cherchez l’intrus !" Cette façon d’associer le messager à la mauvaise nouvelle qu’il apporte est puérile et injuste. Ca revient à donner raison à tous les faux culs, à tous les hypocrites, à tous les lâches qui préfèrent ne rien vous dire, et à considérer comme un ennemi celui qui se dévoue pour vous annoncer la mauvaise nouvelle ou pour vous aider. Et associer à la maladie ceux qui vous aident à lutter contre la maladie, je trouve ça insupportable !

    Examinons de plus près les griefs de Madame Fignon aux médecins :

    1) Laurent Fignon a été informé de son cancer alors qu’il conduisait sur l’autoroute

    La première chose à savoir est qu’un cancer n’est jamais annoncé brutalement pour la simple et bonne raison qu’il n’est JAMAIS découvert avec certitude fortuitement. Dans un premier temps, on soupçonne un cancer, et on déclenche une batterie d’analyses pour le confirmer.

    La brutalité, si brutalité il y a, vient du doute initial. On se doute bien, en fonction des analyses prescrites, que c'est le cancer qui est recherché. 

    Mais un médecin ne vous dira  JAMAIS que vous avez le cancer AVANT avant d’avoir reçu le résultat des analyses qu'il a prescrites tout simplement parce que, même s'il le soupçonne, il n'en a pas la certitude absolue.

    A mon humble avis, ce que le médecin a dit au téléphone à Laurent Fignon est quelque chose comme " J’ai reçu vos résultats. Passez me voir demain à 11 heures pour qu’on en parle" et évidemment, lui, il a traduit à sa femme "Merde les résultats sont positifs, j’ai le cancer".

     

    La deuxième chose est qu’il ne faut pas donner à son médecin son numéro de portable si on ne souhaite pas recevoir les résultats des analyses sur l’autoroute, ou en rendez-vous avec un client ou en train de faire l’amour à sa femme. Il faut lui dire "envoyez-moi les résultats par la poste", c’est plus sûr !

    Et puis, une fois qu’on lui a donné son numéro portable, comment le médecin peut-il savoir si vous conduisez au moment où il vous appelle ? C’est complètement puéril de reprocher à quelqu’un de vous téléphoner pendant que vous conduisez alors que vous êtes le seul des deux à savoir que vous conduisez !

     

    2) Il a fallu attendre neuf mois avant qu’on lui dise qu’il s’agissait d'un cancer des poumons, (lui qui ne fumait pas, ajoute-t-elle)

    Comment peut-on reprocher cela aux médecins ? Cela voudrait dire qu’ils avaient les moyens de faire un diagnostic plus rapidement mais qu’ils ont fait traîner les choses juste pour emmerder le malade ? Un malade atteint du cancer ? Et un sportif célèbre de surcroît ?

    Cela voudrait dire qu’il y a eu complot de plusieurs médecins (le généraliste, le cancérologue, le radiologue) pour retarder l’annonce du diagnostic ? Un énorme complot des médecins contre les malades ? ou des médecins contre Laurent Fignon seulement ? Et tout cela dans quel but ?

    De plus, ajoute-t-elle, comme un reproche, " lui qui ne fumait pas"! Là encore, un peu comme si les médecins étaient responsables de la maladie ! On croit entendre " Lui annoncer un cancer des poumons alors qu’il ne fume pas, quel culot, ces médecins !"

     

    3) Troisième reproche : sitôt après la mort de son mari, la pièce a été nettoyée et le lit refait.

    En fait, elle est retournée dans la chambre pour vérifier qu’elle n’avait rien oublié et elle a constaté que la chambre était déjà rendue disponible pour un autre malade. « La négation de toutes les peines endurées depuis des mois. Ultime violence », lâche-t-elle.

    Ca c’est le plus poignant mais le plus injuste aussi ! Bien sûr, on peut comprendre le choc qu’elle a eu ! Mais a posteriori, elle ne peut pas comprendre, elle ? Elle ne peut pas comprendre que les hôpitaux sont des lieux de soins et non des lieux de mémoire et de souvenirs ? Quelques mois, quelques années après, elle ne peut pas comprendre la nécessité sanitaire et hygiénique qu’il y a de nettoyer rapidement et complètement une chambre qu’un malade vient quitter et ce, quelque soit le motif du départ, décès ou guérison ?

    Pour moi, Valérie Fignon parle sous le coup de la douleur et du chagrin et dit n’importe quoi !

    Et moi, si je la critique, c’est peut-être parce que j’aurais tellement aimé qu’une femme m’aime comme ça, totalement, subjectivement, en faisant preuve de la mauvaise foi la plus totale, en attaquant le corps médical pour m’avoir laissé mourir, en refusant de m’oublier et de passer à autre chose, en estimant que c’est trop injuste que cela me soit arrivé à moi !

    Mais aucune femme ne m’a aimé comme ça ! ! Et ma fille a guéri du cancer ! Alors je peux me permettre d’être objectif !

    Et de critiquer les gens qui sont dans la peine !

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